A la Lueur du Lampadaire !

Prologue à l’aventure !

 

Prologue à l’aventure !

 

On parle de la page blanche chez les humains. D’après ce que j’ai entendu, bien sûr. Je ne suis pas de ce monde-là, je connais à peine l’écriture… Ils disent « le stress de la page blanche. » Comme on dit « le trac de la scène. » Tu as ton stylo en main, une feuille exempte d’écriture et tu cherches quoi écrire. Sans trouver. Sueurs froides, esprit qui chauffe et qui s’embrouille, membres tremblants, mais aucun trait cohérent sur cette page. Humm. Quelques points sont derrière moi. D’encre ? Ça fait comme un creux dans le sol. C’est noir mais l’impression de voir est bien là ; peut-être parce que je sais de quoi il s’agit et que c’est moi qui agit. Regarde bien. Des traces de pas, et puis de la désorientation totale, et puis des frissons dans le dos. Beaucoup de choses que je sais sont dans la tête mais comment les sortir ? Après des efforts, la sensation de toucher me prouve que je suis un entier : une tête, des épaules, deux bras, un poitrail, des hanches, deux jambes. Et qui marche sur ce qui semble être une solide surface plane. Je suis une forme physique et un ensemble psychique. Je suis, je sais et je fais. Oui, ça me résume bien. Et là j’attends. Dans cet environnement noir, un temps incalculable.

On arrive. Un espace se profile au devant de moi. Avec la clarté qu’il inonde, je peux voir le paysage en moi-même. Merveilles des deux côtés. Plein de nuances vertes dans des courbes aériennes. Bleu au-dessus, parfois brun et blanc sous mes pas. Une peau claire et fine et tout doux à voir. Une étole légèrement fluide autour. Et des mouvements. Dans mon poitrail, dans cette vallée. Je suis sortie de l’invisible pour venir dans ce monde. Y vivre. Je sais ce qu’il faut faire. Y agir.

Je regarde de tout côté. Il y a là des arbres, de l’herbe, des fleurs. Il y a là le clapotis de l’eau, le pépiement d’oiseaux, le souffle du vent. Mes sens me disent temps tranquille, pas de chemin de main d’homme. Je suis au bout du monde. Quand tout est calme, pas de tumulte. Comme je sais qu’un jour il y aura. Je vais voir l’eau : elle est limpide. Elle est propre : je peux la boire. Je cherche des baies : elles sont là. Elles sont belles : je les ai bien trouvées. Je tâte l’herbe : elle est moelleuse. Elle est étendue : moi aussi. Quel délice ! Après j’irai voir si je peux me trouver de la compagnie.

Un homme est penché au-dessus de la crête d’un rocher, la main tenant quelque chose sur cette même crête. Peau claire, muscles développés, un pagne de cuir brun, cheveux blonds tombant sur l’épaule. Je m’approche un peu craintivement pour qu’il ne se sente pas menacé. Il m’accueille amicalement. Et intrigué. Nous rebroussons chemin jusqu’à mon point d’origine. Il voit la brume noire suspendue. Il n’y a rien par là. Il s’y dirige. Il ne trouvera rien. Il ne saura même pas qu’il a marché pendant des jours entiers sans jours sans entier sauf moi qui l’attends de ce côté du monde. Il fera demi-tour, reprendra sa marche et sortira. Elle doit bien venir de quelque part. Je ne la trouve pas. Je le lui demanderai. En l’attendant, moi je profite du paysage. Je ne vais pas partir de là en le laissant dans cet espace vide. Je sais qu’il ne tardera pas. Je l’espère. Oui, il quitte cette brume. Qu’as-tu trouvé ? Rien. Peut-être si j’avais marché plus longtemps… Non. Il n’y a pas de temps là-dedans. Et toi alors, d’où viens-tu ? Je sais beaucoup de choses mais pas ça. Tu me raconteras ce que tu sais ? Oui, et toi, tu me montres le monde. Oui. Le corps, les bons sens, le monde, l’humain et il est plus facile de vivre. De construire. De placer des mots à l’oreille puis à l’écrit.

C’est comme ça que j’ai commencé.

A l’aventure… on l’entend…



01/04/2010
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