Yei Theodora Ozaki : lisez des fables
Le nombre de fables rapportées par YTO est plus important que ceux de Claudius Ferrand, dont quelques-uns se retrouvent. Le texte, tant en français qu'en anglais, garde la même fraîcheur : des fables pour apprendre la moralité par la fiction, des choses plutôt simples qui pousseront les têtes blondes à réfléchir sur le contexte réel. Des personnages et des situations bizarres d'un point de vue occidental font leur entrée : par exemple, le fils d'une pêche, que j'imagine jouffu et tête blonde ; ou un dragon qui cherche à recruter un soldat en dormant sur une route fréquentée... ou des noms à consonnance drôle du type (au mot à mot) seigneur Sac de Riz (car il possède un fond inépuisable de riz...)
Je précise qu'une fable a tendance à être réelle plus que ne l'est un roman ! Une sorte de vérité transmise entre les générations. Certains diront qu'elle en est déformée et reformée tant et tant mais tous savent qu'une partie est toujours là et vraie dans le saint but de révéler (et de les expier ?) des secrets sur la communauté humaine tout en cachant les affreusités. On croit donc cette fable et la leçon qu'elle nous donne alors qu'elle nous incite à ne pas croire du tout par son extraordinarité à mélanger le réel (et donc la vérité) et l'irréel soit des faits et des choses impossibles à accomplir ou même à penser.
Mais qui a inventé la fable ? Pour ma part, la fable est un détournement de la légende (mythe) qui, elle, donne des faits sans les rendre fictifs ! La légende est certes embellie à l'avantage du héros afin d'inciter les spectateurs-auditeurs à admirer ces derniers - je vous rappelle que la fable donne des leçons de vie que chacun peut répéter, c'est pourquoi elle est si courte : par exemple, 10 pages en moyenne contre 599 de l'Illiade (en édition poche et prose française.)
Alors la recette d'une bonne fable est... je ne saurais le dire exactement. Est-ce l'atmosphère particulière qui s'en dégage ? Je me rappelle d'avoir lu un récit de fiction traité comme une fable mais le ton ou je ne sais quoi n'indiquait pas du tout une ambiance fablesque. Le contraire de l'écrit de YTO : le style est... bah, se laisse lire... voire, se raconter gentillement ! Tout comme celui de Ferrand. Cela tient aussi peut-être des centaines d'années de fermentation culturelle... Une fable doit donc vieillir... Avis aux amateurs : la publication de votre recueil de fables vous rendront célèbres dans, disons, trois cents ans !
Une chose est sûre : l'atmosphère des fables est bien différente d'un récit romanesque ! Je ne saurai pourquoi... La lecture est très plaisante surtout si l'on lit à voix haute avec des auditeurs et les meilleurs d'entres eux sont d'âge moyen 8 ans qui vous écoutent bouche bée, penchés en avant et râlant comme pas deux dès que la séance de lecture finie !!!
Et si je cherche bien sur mes étagères, je crois y avoir vu un livre de fables japonnaises... écrit par Lafcadio Hearn.
P.S. : Lisez les fables à voix haute.