Les Dieux Chiens : rien n'est simple avec les dieux !
LES DIEUX CHIENS
C'est une grande sérénité qui se dégage de ce livre, malgré les dramatiques évènements. Oh ce village ! J'aimerai bien finir dans un village serein comme celui-là ! Si je ne suis pas ambitieux, bien sûr, car les hautes sphères se situent aussi haut que les grattes-ciels des mégalopoles... Et pour ceux qui ne sont pas convaincu(e)s, la technologie s'exporte très bien dans les petits villages de montagnes, so just trust me, je l'ai expérimenté !
Le style d'écriture détonne : ce sont les même mots employés que le dico mais l'ensemble donne cette sérénité pour tout le roman ! C'est étonnant ! Par exemple, dans les premiers chapitres, les villageois font des cauchemars, c'est donc angoissant, mais ce n'est que le calme que j'y ai vu. Surprenant ? De même pour l'incendie qui ravage tout : l'héroine est décrite de telle façon qu'elle semble s'endormir, certes, un peu agitée mais sans plus.
Est-ce le titre et/ou le sujet qui intimide cette ambiance ? "Dieux" est un mot spirituel et empirique, pas (forcément) scientifique... Le fantastique est tourné en mysticisme (religieux, sectaire, etc) sans que la présence fantômatique ne l'influence (une histoire de fantôme a une atmosphère bien plus objective.)
La 4ème de couv' dit "qui frise le fantastique" ; "mais pas du tout, Madame La 4ème de couv' !" je réponds. C'est bien du fantastique ! Disséminé comme le fantastique dans la vie réelle ! Ah bon, personne ne savait qu'il y a du fanstastique dans la vraie vie ! Que je vous explique : il vous est bien arrivé des trucs que vous ne pouvez expliquer clairement ? Bah voilà, c'est ça, le fantastique de la vraie vie ! (S'il y a une explication claire plus tard, ça change de nature, et c'est tout !) J'ai toute ma tête, n'ayez crainte...
Le roman m'a fasciné. Je l'ai lu chapitre par chapitre, lentement. Est-ce le récit/le sujet ou le style d'écriture qui ralentit mon rythme de lecture ? Je n'ai jamais lu aussi lentement ! Et pourtant ce n'est pas l'envie qui manquait de finir vite car d'autres livres m'attendent - et ce qui me fait penser à : "Vais-je pourvoir terminer tous mes challenges de lectures pour juin 2011?" (j'en ai que 3 mais c'est déjà pas mal pour moi...) Je n'ai pas d'explication à donner à cette lenteur...
Est-ce une coincidence ? Une fatigue arrivée sans symptômes visibles ? Ou...
Après quelques recherches, l'auteure Mme Masako-san trouve les sujets de ses romans d'après des légendes de son île natale, Shikoku. Son genre litéraire est appelé "roman du terroir" et ça donne de très beaux récits, soit dit en passant... Donc les sujets sont peut-être des histoires vraies...
J'ai la chance de partager des cultures qui ne se ressemblent pas entre elles. Malgré tout, le chien tient une place dans toutes ces croyances populaires. D'abord, les normands croient qu'un chien noir (la couleur est significative) est un porte-malheur et donc se faire suivre pousse à des très grands malheurs. Au contraire, certaines supertitions celtiques décident que le chien porte bonheur. Pour les anatoliens, le chien est une expression que prennent les esprits malfaisants de la nature quand ils décident d'attaquer un humain en plein jour. Enfin, les anciens grecs et romains attribuent le rôle de Gardien des Enfers à un chien nommé Cerbère malgré le nombre excessif de tête. Que dois-je penser de tout cela ? Surtout que je rédige également une nouvelle sur le canidé - genre fantastisque, hien, les documentaires font pas partis de mes talents... Il est sûr que je ne peux pas mixer toutes ces croyances mais juste de tenter de les comprendre...
Je ne regarderai plus les chiens de la même manière ! En cas général, les animaux ne m'interressent pas, sauf s'il y en a un qui s'est échappé du zoo ou si je tente d'aller à la chasse juste pour les capturer au collet ou au Cannon... De là à savoir qu'ils abrittent des esprits... on va y réfléchir à deux fois ! Néanmoins je ne suis pas superticieux. Juste prudent...
Je crois avoir mentionné que le texte est peut-être issu d'une histoire vraie. Sauf quelques détails, cela semble logique : les pressions psychologiques sont explicables, les mauvais rêves de tout un village est tout à fait possible : étant du à l'arrivée d'un étranger qui, au premier abord, semble sympathique mais qu'ensuite, l'in- ou sub-conscience (à demander à un vrai psy) générale ne semble pas accepter... La chose impossible pourtant décrite dans le texte est la survie d'un foetus dans le corps mort et enterré de sa mère puis les mouvements faits par ce même enfant pour remonter à la surface en creusant la tombe ! Vous êtes d'accord avec moi, n'est-ce pas ?
Cette dernière phrase donne tout le peps du récit : il est nécessaire de continuer (à l'oral ou l'écrit) les évènements ! Qu'est-ce que ce petit monstre ? Va-t-il grandir comme un enfant normal ou comme le méchant gardien des dieux chiens ? Comment va-t-il s'appeler ? Bah oui, c'est parfois des questions triviales qui épicent un texte. L'homme qui l'a trouvé va-t-il l'aider à vivre ou le tuer pour réduire les malheurs à venir ? Pour cette question, je pense qu'il laissera l'enfant en vie car il m'a semblé qu'il a eu une bouffée de mépris pour les gens du village qui a fait des morts juste pour se débarrasser des Bonomiya, gardiens des dieux chiens. Ensuite, l'enfant viendra-t-il se venger en apportant le malheur décrit dans la légende ? Le village d'Ominé disparaitra-t-il après ça ? Cette douce tranquilité va-t-elle se transformer en véritable enfer, dans la bonne continuation du récit ? En effet, l'histoire commence un jour tranquille, une description sereine ; puis on apprend que l'héroïne Miki Bonomiya est surtout triste de sa vie sans être dépressive ; peu à peu, la tension augmente et les passions se déchaînent : comme a dit mon prof de philo il y a des millénaires, le grand bonheur tel l'amour ou le grand malheur comme la haine sont des sentiments si forts qu'on ne peut pas stopper d'un simple geste donc de la passion. L'histoire aurait pris fin dans l'incendie qui figure concrètement les passions déchainées. Pourquoi avoir fait sortir Miki de l'incendie ? Pourquoi faire vivre le presque-monstre ? Pour donner de l'espoir à chacun, quel que soit les sentiments bons ou mauvais qui nous habitent ? Ou bien pour asséner un bon coup aux criminels en tout genre pour les punir de leurs crimes ? N'oublions pas que la société use de la coercision comme punition : peur, violence, brutalité, limitation de la liberté individuelle : le Père Fouettard a une bonne raison de vivre...
Enfin, pour finir mon apologie, certains diront que c'est long, l'action tardant à venir, que l'héroïne se plaint de sa misérable vie et qu'il y a beaucoup trop de répétitions de pensées. Certes, je pense que ça l'est ; ce n'est pas un roman aux actions rebondissantes. Mais le lot de mystères et de problèmes n'est pas exclu, l'intrigue est prenante et le sujet bien traité. Qui se serait douté que l'incendie a été provoqué exprès ? Et pourtant, l'auteur nous a donné un indice : tous s'occupaient à le préparer ; sauf que nous, lecteurs, n'avons pas pensés que l'indice en question se rapporterait à l'incendie, non, voilà ce qu'on s'est dit : "nous sommes dans un village, quoi de plus normal, hein !" C'est en cela que le sujet est trop bien traité : le crime parfait ! A bien chercher, le genre de ce roman serait bien du policier ! Et l'enquêtrice, la belle Miki Bonomiya !
Ma transition est toute trouvée : il se dégage de ce roman et des personnages une certaine beauté. Peut-être est-ce l'exotisme du cadre littéraire - le Japon est très loin de la France tant géographiquement que culturellement - qui peint les personnages en beaux personnages. La personnalité de certains influence beaucoup dans cette beauté, par exemple, le vieil Ajimoto avec sa canne de marche et ses phrases lourdes de mystère et de peur avec lesquelles il tourne en dérision les gens du village : les gens ne savent pas quoi en penser alors que lui-même en rit à gorge déployée ! Quant à Miki, la sérénité qui habite sa vie et son coeur, malgré les quelques troubles qui s'y forment, la rend belle, son âge de 40 ans en est effacé pour se changer en plus jeune sans qu'elle, Miki, ne s'en soucie.
Et les personnages qui ne sont pas affectés par ce dernier paragraphe s'embellissent par la narration particulière de Masako-san. En la lisant je me suis laissé lire que c'était Shakespeare qui nous contait ses pièces de théâtre. Pour la bonne raison que ces deux auteurs utilisent le même effet litéraire soit l'alternance de l'action avec des instants de pauses. Shakespeare alterne les drames tragiques avec les actions qui prêtent à rire tandis que Masako-san alterne les actions, tous genres confondus, avec une description de la sérénité du lieu. Elle n'écrit pas tout un (long) paragraphe, juste deux petites phrases insérées. Et ceci tend à rassurer de la tension extrême qui règne dans l'histoire. Mais aussi, d'une certaine manière, ça rend l'action dramatique à fleur de peau, plus accérée, plus douloureuse. Ca laisse voir à la fois une cruauté pure l'instant d'après et une beauté pure des gens l'instant d'avant. La cruauté devenant l'avertissement à ne pas oublier ; la beauté restant le seul souvenir que nous gardons afin de rester serein longtemps....